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24/11/2025
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Accueil des gens du voyage : faire évoluer le cadre législatif 

Vingt-cinq ans après son adoption, la loi Besson du 5 juillet 2000 relative à l'accueil et à l'habitat des gens du voyage était au coeur des échanges du forum organisé le 19 novembre.

Par Sophie Le Gall
Si la question de l'efficacité de la loi Besson demeure, un point a semblé faire l'unanimité lors du forum sur les gens du voyage, le 19 novembre : le bien-fondé des terrains familiaux locatifs.
© Capture vidéo AMF
Si la question de l'efficacité de la loi Besson demeure, un point a semblé faire l'unanimité lors du forum sur les gens du voyage, le 19 novembre : le bien-fondé des terrains familiaux locatifs.
La question de l’accueil des gens du voyage reste un sujet clivant ! Lors du forum “Les gens du voyage : bilan et perspectives de la loi Besson“, co-présidé par Philippe Buisson, maire de Libourne (33), président de la communauté d’agglomération du Libournais, et Patrick Delebarre, maire de Bondues (59), tous les deux co-présidents du groupe de travail «Gens du voyage » de l’AMF, les intervenants se sont divisés en trois camps : ceux partisans de faire appliquer pleinement la loi Besson afin d’améliorer la qualité de l’accueil, ceux demandant l’adaptation du texte et, enfin, ceux désireux de voir le Parlement adopter une nouvelle loi qui, en priorité, protègerait les collectivités et les particuliers des occupations illicites, largement évoquées. 

La maire de Rezé (44), Agnès Bourgeais, a rappelé, à plusieurs reprises, que «l’application de la loi n’est pas une option », une manière de rappeler la nécessité d’agir aux maires en retard dans la mise en œuvre de leurs obligations prévues par le schéma départemental d’accueil et d’habitat des gens du voyage, notamment en termes de constructions d’aires d’accueil. L’élue a pointé des «aires surpeuplées », où «on ne vivrait pas », tout en reconnaissant que «oui, ce n’est pas simple » et que «l’État doit reprendre son rôle », pourquoi pas en créant «un fonds ». «La question des gens du voyage n’est pas qu’une question de stationnement (…), parlons accompagnement, médiation », a-t-elle également souligné. 

Pour Dominique Raimbourg, président de la Commission nationale consultative des gens du voyage, l’urgence est surtout à la mise en place d’un pilote qui «ferait vivre » les schémas départementaux d'accueil et d'habitat des gens du voyage car la totalité des prescriptions prévues par ces schémas n'a été "réalisée que dans douze départements", a-t-il précisé. « J'ai un terrain de grand passage et je suis quand même envahi parce que dans mon intercommunalité et dans mon département, on a la moitié des terrains qui sont faits", a témoigné Patrick Delebarre.

Cependant, plusieurs élus ont souligné, à l’instar de la députée de la Moselle, Nathalie Colin-Oesterlé, que "le fait d'être complétement conformes aux prescriptions légales n'empêche en rien les occupations illicites" avec des coûts de remise en état des terrains élevés. 

Un groupe de travail et une proposition de loi

« Pourquoi continuer d’avoir une loi d’exception pour des concitoyens qui sont Français ? », s’est interrogé Philippe Buisson en soulignant que "les gens du voyage sont la plupart du temps sédentarisés ou semi-sédentarisés", ce qui a entrainé l'abandon du "livret de circulation". L’élu est en tout cas favorable à une révision de la loi Besson. Il a rappelé que l’AMF a participé aux consultations menées sur le sujet, au printemps 2025, par le préfet Philip Alloncle, à la demande de François-Noël Buffet, alors ministre auprès du ministre de l’Intérieur, dans le cadre du groupe de travail «sur l’accueil des gens du voyage et la lutte contre les installations illégales » dont les propositions ont été dévoilée en juillet (lire notre article).

Participant au forum, le préfet Philip Alloncle a reconnu que «la répartition des rôles n’est pas simple entre l’État et les collectivités (…) pour lesquelles ces dispositifs [d’accueil] coûtent cher en investissement comme en gestion », dans un contexte où 76 % des aires d’accueil obligatoires prévues par les schémas départementaux sont réalisées et 66 % des aires de grand passage, a-t-il précisé. Il a admis que l’on peut «toujours estimer que l’apport de l’État n’est pas assez suffisant ». 

Dans la foulée du rapport établi par le groupe de travail auquel elle a participé, Nathalie Colin-Osterlé a déposé, mi-novembre, une proposition de loi reprenant certaines propositions du groupe de travail (renforcement des sanctions en cas d’occupation illicite de terrain, pouvoir accru du préfet en matière d’évacuation, renforcement des règles relatives à l’utilisation des aires d’accueil, accueil des grands passages). Le texte sera mis en ligne prochainement.

La solution des terrains familiaux

Un point semble faire l’unanimité : le bien-fondé des terrains familiaux locatifs (TFL). Ces terrains, destinés à l'installation prolongée de résidences mobiles (superficie minimum de 75 m2), sont attribués à raison d'un terrain par ménage, sont clôturés et raccordés à un système d'assainissement.

Le maire de Vineuil (41), François Fromet, a témoigné d’une expérience réussie «en installant [les gens du voyage] famille par famille et non en les regroupant, avec des enfants scolarisés, et en rappelant, une fois l’installation effective, les droits et les devoirs» des occupants. Les TFL rentrent déjà dans le quota des logements sociaux à raison de 1 unité logement pour 1 TFL. Patrick Delebarre propose d’aligner le nombre d’unité logement par famille au sein d’un même TFL. Cette question renvoie au cadre juridique de la caravane-habitat non considérée comme un logement. 

Le dispositif est en tout cas prometteur car il répond au besoin de sédentarisation de la communauté itinérante même si, pour Dominique Raimbourg, il convient davantage de parler «d’un besoin d’ancrage plus que de sédentarisation, avec la possibilité de continuer à se déplacer ». Seuls 20 % des terrains familiaux prévus par les schémas départementaux sont réalisés, a précisé le préfet Alloncle. Une marge de progression significative pour les élus. 
 

Un public à (re)découvrir
Plusieurs élus présents dans la salle ont exprimé leurs besoins de mieux connaître le public des gens du voyage, dont le nombre total est estimé entre 300 000 et 500 000 personnes.
Un avis partagé par Patrick Delebarre, co-président du groupe de travail «Gens du voyage » de l’AMF : «Il faut former les élus, les agents », a-t-il souligné tout en regrettant, premier obstacle, qu’il «manque une base documentaire sur le sujet ». 
Le maire de Bondues (59) appelle parallèlement de ses vœux «la constitution d’une base documentaire des bonnes pratiques » des collectivités en termes d’accueil des gens du voyage afin de mutualiser les expériences. 

 

. Retrouvez la vidéo du forum sur " Les gens du voyage : quel bilan de la loi Besson ? "

. Lire aussi notre dossier spécial " 107e Congrès de l'AMF 2025 "

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